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Bonjour à tous, nous revoilà pour un nouvel épisode des bourdes de mes amis et collègues journalistes.

Commençons avec les classiques erreurs syntaxiques, qui donnent toujours des résultats amusants, pour peu qu’on soit facétieux et qu’on ait un peu d’imagination.

Nous avons déjà parlé d’alcool, au sujet duquel nous nous disputons avec nos voisins mais néanmoins amis Bretons pour savoir qui en consomme le plus. La dernière fois, nous tentions de laisser entendre que même nos voitures étaient alcoolisées. Cette fois-ci, suite à un accident de la circulation à la suite duquel le conducteur est sorti indemne de son véhicule, nous apprenons que,

« Avec 1,62 grammes d’alcool dans le sang, ce sont les policiers qui l’ont pris en charge ».

Ainsi, même nos policiers sont alcoolisés. Mais j’ai soudainement un doute : est-ce une spécificité locale ?

Passons donc. Un autre fait divers racontait comment une charmante soirée amicale s’était finie en bataille à coups de couteaux. L’un de ces couteaux, lancé en direction d’un des protagonistes, évita le pire :

« Ayant juste eu le temps de baisser la tête, l’ustensile s’écrasa dans le buffet »

Si nos voitures boivent trop, nos couteaux, eux, ont manifestement des reflexes bien… affutés.

Certaines informations, sans être des erreurs du journaliste, me font parfois tiquer. Ainsi, le dernier dimanche d’avril est-il destiné, au niveau national, à

« honorer la mémoire de tous les déportés, sans distinction. »

C’est pourquoi, ce week-end là, on apprenait que

« La ville d’Avranches a rendu hommage aux Juifs arrêtés et déportés… »

C’est-à-dire à tous les déportés sans distinction à part les opposants politiques, les homosexuels, les Tsiganes, les catholiques, les Polonais, et tous les autres. Ce qui apparemment ne dérangeait personne, et en tout cas pas le journaliste qui rapportait l’information.

Dans le même genre agaçant… Lors du week-end de Pâques, de nombreuses chasses aux œufs étaient organisées pour les enfants. L’une d’elle obéissait à un système pratique, ingénieux, et anti-discriminant : tous les enfants partaient à la chasse et rapportaient les œufs qu’ils trouvaient en un même endroit. Ensuite,

« par soucis d’équité, les œufs trouvés ont été partagés entre tous les enfants ».

Même Pâques est devenu une occasion de lobotomiser les enfants, en leur apprenant qu’il est équitable que celui qui est incapable de se servir de ses deux yeux pour trouver un œuf au chocolat aient pourtant le même nombre d’œufs que celui qui a couru partout pour en rapporter un maximum. Si ces gamins avaient eu un peu de jugeote, ils seraient tous restés sur place au moment du départ, et aurait attendu que les organisateurs cherchent les œufs à leur place et leur donnent. Et se seraient constitués en soviet.

Quant au journaliste, je l’aurais volontiers pendu haut et court pour avoir dévoyé ce si beau mot, « équité », le confondant minablement avec la méprisable « égalité ». Heureusement pour lui, dans un autre article, il a investi un des élus de sa ville d’une

« Mission de lutte contre les discriminations et la promotion de l’égalité »,

je l’ai donc pardonné volontiers.

Si certains font preuve d’un courage ou d’un esprit d’initiative qui leur fait parfois écrire des bêtises, d’autres en revanche se montrent plus prudents. Et pêchent aussi par excès. La volonté de ne pas discriminer nos chers trichromosomiques et autres légumes en fauteuil roulant justifie-t-elle de les désigner sous le vocable de

« Personnes dites en situation de handicap » ?

Promis, la prochaine fois, je ne parlerai plus que de « personnes souffrant d’une situation dite de handicap », ou d’individus « en situation de souffrance à cause d’un dit handicap ». Mes textes en gagneront en bienséance ce qu’ils perdront en clarté. Mais si cela peut

« apaiser les craintes sur les peurs »

de ces personnes souffrant de cette situation qu’on taxe de handicap, alors c’est un sacrifice auquel je consent volontiers.

Et puis parfois, les journalistes n’y peuvent rien : c’est les gens dont ils parlent qui sont graves. Le plus souvent, c’est des « artistes ». Parfois de beaux spécimens de cuistres inopérants, du genre de mon ami Criquet. Entre une nana qui conçoit des meubles de salon en béton décorés d’une queue de cheval (je regrette de n’avoir pas gardé la photo, c’était somptueux. Et la légende était pas mal. Surtout après que j’y aie apporté ma contribution…) et le mec qui construit des totems en empilant des boules en… béton (tiens, un visionnaire) et les surplombant d’une sphère représentant l’univers, parce que

« la Terre ne suffit pas, il faudra bientôt aller sur d’autres planètes »

(vas-y, mon grand, on ne te retient pas), il y avait ce sympathique jeune homme, nommé Thomas Lanfranchi, dont l’explication titilla la curiosité du lecteur que j’étais :

« J’utilise le vent et l’espace, en intervenant dans des sites souvent extérieurs. Ces deux éléments me permettent de m’approcher au plus près des mes idées de lévitation monochromique et formelle qui sont au centre de mes recherches. »

Tout titillé que j’étais, je fis une petite recherche, qui me mena à cette vidéo. Dans laquelle il apparaît clairement que ce brave garçon… fabrique des cerfs-volants. Qui se révèlent assez peu aptes à voler, d’ailleurs, manifestement.

Comme quoi, dans l’art moderne, l’art est dans l’explication de l’œuvre…