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Belles lettres, Berthe au grand pied, Cadeau de Noël, Chanson de geste, Matière de France, Rémi Usseil
Il y a quelques semaines, j’ai reçu dans ma boite aux lettres (la vraie, celle en métal où on met du papier dedans) un colis. Qui contenait un livre. Que j’ai ouverts. Le colis, d’abord ; le livre ensuite.
Ce colis m’avait été envoyé par l’ami Rémi Usseil, que vous connaissez peut-être sous le nom de Matière de France, voire de Mat puisque c’est sous ce pseudo qu’il commente parfois ici.
Il me l’avait envoyé totalement gratuitement, sans espérer une seule seconde que j’en parle en ces lignes. J’en parlerai néanmoins, pour une raison très simple : je l’ai lu d’une traite, en prenant sur mes heures de sommeil, ce qui est toujours bon signe. Par exemple, lorsque Houellebecq m’avait envoyé son dernier livre, j’ai fait l’inverse : j’ai pris sur mes heures de lecture pour faire une bonne sieste. Pour tout dire, j’ai trouvé ça assez mauvais ; et je crois que je sais dans quel sens allait le lien de cause à effet.
Bref, j’ai lu ce livre et l’ai aimé.
Mais laissez-moi vous en dire un peu plus. Tout d’abord, voici à quoi ça ressemble :
Et dedans, me direz-vous ? Dedans, c’est l’histoire – la légende, devrais-je dire – de Berthe, mère de Charlemagne, racontée à la façon du ménestrel du Moyen-âge. Une chanson de geste écrite en respectant les codes de ce genre et le style de l’époque, actualisé mais pas trop.
Le résultat, nous l’avons vu, c’est un bouquin plaisant, qui se lit très bien et avec plaisir, et qui plonge son lecteur pour quelques instants dans l’ambiance d’un banquet médiéval, sans les montreurs d’ours et les jongleurs. On ne peut pas tout avoir.
Tout ça est d’ailleurs illustré de reproductions d’œuvres picturales de la même époque, oeuvres qu’on connait finalement assez peu, reléguées qu’elles sont trop souvent aux pages « Heures sombres de notre histoire » dans les livres de 4e. Ce qui est injuste.
Si vous ne savez pas quoi offrir à Noël, n’hésitez plus : pour peu que votre cible sache lire et soit en possession d’un reste de curiosité, alors ce bouquin fera un beau cadeau.
Filez-donc dès maintenant sur la page Amazon (hélas) du bouquin. Vous y trouverez en prime un beau commentaire signé de m’sieur Étienne, qui vous en dira plus et mieux sur l’œuvre.
[Ajout le 9 décembre : je découvre que ce livre est également – et tout-à-fait logiquement – en vente sur le site de l’éditeur. C’est donc plutôt là-bas qu’il faut aller l’acheter directement plutôt que d’aller engraisser Amazon.
Fin de l’ajout.]
Et puisque j’ai promis à l’auteur une critique férocement honnête, je ne peux conclure cet article sans apporter un petit bémol, qui ne change rien à tout ce qui est dit précédemment.
Dans un de ses mails, l’auteur évoquait quelque part le « combat culturel » que nous avons tous à mener. C’est une cause noble et belle, et ce livre est une première étape. J’espère que la deuxième étape sera un peu plus ambitieuse : ce talent certain que nous montre Rémi Usseil serait à mon avis un peu gâché s’il ne servait qu’à faire revivre de façon intelligible et appréciable par le Français d’aujourd’hui des contes et légendes du millénaire dernier.
L’auteur gagnera à mon avis à utiliser sa plume, non à glorifier les héros et figures du passé, mais au contraire à offrir à notre temps de nouveaux héros. Balavoine chantait : « Il faudrait changer les héros dans un monde où le plus beau reste à faire ». Il a raison : ces héros-là ont vécu et ont fait leur office. Comment se sentir proche d’une femme portant coiffe et d’un chevalier en armure ? Et partant, comment se sentir l’envie de leur ressembler ?
Cher Rémi, donnez-nous des héros ! Contez-nous comme vous savez le faire les aventures d’un héros moderne, d’un homme ou d’une femme qui nous ressemble et à qui nous aurons envie de ressembler plus après vous avoir lu ! Ils ne manquent pas, les héros méconnus qui n’attendent que d’être révélés.
Si vous ne l’avez pas déjà lu, je ne saurais trop vous conseiller Moi, Antoine de Tounens, roi de Patagonie, livre de Jean Raspail que j’ai lu juste après le vôtre. D’un tel personnage, Raspail fait un héros moderne – un héros un brin ironique, comme toujours chez Raspail. Je ne doute pas qu’il y en ait d’autres qui, sous votre plume, reprendraient vie pour le plus grand avantage de vos lecteurs, qui y trouveraient un modèle à la hauteur de leurs rêves inavoués.
Sachez transformer ce bon moment de lecture que vous nous offrez avec Berthe en un beau moment de rêve et d’enthousiasme.
Je ne doute pas que vous saurez le faire au moins aussi bien que je rêve moi-même de le faire, dans les moments où j’oublie que je ne suis qu’un petit pondeur d’articulets sans ambition et de Best-of dont personne ne veut.
Bien à vous.
Et joyeux Noël à tous !
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Si tu as aimé le style et que tu ne l’a pas déjà lu, je te recommande « introduction a la vie devote » de St François de Salles ! 🙂
Un bien bel article. 🙂
Très bel article.
Sinon, j’avoue ne pas être tout à fait d’accord avec la fin. On peut trouver de quoi élever son âme, de belles et bonnes vertus, parmi les grandes figures de notre riche passé. Bien plus facilement, à mon sens, que dans cette triste époque qu’est la nôtre. Ce que vous proposez est un art difficile. Il n’y a guère que Raspail qui y soit arrivé dans le monde des lettres et Schoendorffer au cinéma. Et encore, ces derniers sont conspués. Autant dire que leur capacité de séduction ne va guère au delà de ceux qui sont déjà convaincus.
Il y a du vrai. Mais je trouve plus beau de se planter en essayant que de se « contenter » de refaire ce qui a déjà été fait.
On verra si j’y parviens dans mon domaine. Il y a encore BEAUCOUP de travail.
Oh, monsieur Koltchak, moi j’en trouve bien souvent des héros formidables de notre époque … il faut juste savoir ouvrir les yeux. Les héros de la vie ordinaire sont les plus beaux, et le plus souvent ils s’ignorent.
Tu veux l’adresse de Mat, pour lui envoyer les noms ? 😉
Merci 100 fois mon cher Fik, de cette recension, et 1000 fois de cet ajout renvoyant au site de l’éditeur, plutôt qu’à celui de l’un de mes ennemis personnels…